Témoignages zébrés
Moi, J. 1 an, la solitude est un ami. Pendant des heures, je joue, je me raconte des histoires à n’en plus finir. Oui mais je ne suis pas “comme les autres”. Je dois être comme eux, c’est comme ça.
Moi, J. 6 ans, je pose question sur question, le pourquoi amène le comment qui lui amène encore plus de questions. Oui mais “arrête de poser des questions, trouve toute seule ! “, c’est comme ça.
Moi, J. 8 ans, je ne suis pas la meilleure en classe pour mes parents, mais “il faut être la meilleure”, c’est comme ça.
Moi, J. 10 ans, je déteste l’injustice oui mais “on n’y peut rien ma chérie”, c’est comme ça.
Moi, J. 12 ans, j’ai toujours ‘peur du loup’ oui mais “à mon âge, je suis grande !”, c’est comme ça.
Moi, J. 14ans, je préfère faire des puzzles que de me faire des amis. Oui mais “je dois en avoir” , c’est comme ça.
Moi, J. 16 ans, je m’ennuie en cours, je m’ennuie au sport, je m’ennuie lorsque je ne suis pas seule, oui mais “si tu n’y met pas du tien”, c’est comme ça.
Moi, J. 20 ans, je souffre pour les autres oui mais “les problèmes des autres, ce sont leurs problèmes” c’est comme ça.
Moi, J. 23 ans, je suis perfectionniste dans tout ce que je fais oui mais “ce n’est pas grave si ce n’est pas parfait”, c’est comme ça.
Moi, J. 27 ans, je suis toujours maladroite, “oui mais si tu faisais attention ! ” , c’est comme ça.
Moi, maintenant, … c’est pour les ‘c’est comme ça’ que j’ai du mal à me trouver, à trouver qui je suis vraiment.
Les ‘c’est comme ça’ peuvent faire mal et ne pas être compris dans le bon sens, ils peuvent contrarier et enfoncer une personnalité.
C’est pour tous les ‘c’est comme ça’ prononcés par mes parents, mes proches, mes profs,…, que j’écris maintenant. Pour dire que non ce n’est pas comme ça, que je ne suis pas comme ça. Pour dire que si avant vous ne saviez pas, c’est comme ça, mais maintenant que moi je le sais que je le suis, alors ça ne sera plus comme ça mais comme moi.
JV, jeune femme zébrée
Un soir sur la planète.
Un chat qui dort recroquevillé sur lui même.
Moi ici… seule
Et les autres, ils font quoi ? ils sont où ? est-ce qu’ils souffrent ?
Moi dans une bulle en pensant à ce qui se passe en dehors de la bulle.
Un soir sur ma planète.
Moi ici.. mais avec un millier de personnes dans mes pensées. Mais que faites-vous ? Où êtes-vous ?
La chair à vif, les pensées dans le flou, je suis parfois obligée de m’abrutir pour ne pas souffrir, pour ne pas penser.
J’ai du mal à expliquer que je souffre pour vous parce que je pense que c’est difficile à entendre avant d’être difficile à expliquer.
Ca ne m’est pas arrivé, je ne l’ai pas ‘vécu’ mais comment expliquer que je comprend au sens propre, sans erreur de langage.
J’ai honte de ne pas avoir vécu ses choses et de les ressentir parce que je ne devrais pas. Je devrais aller m’éclater en toute insouciance, sans penser aux autres. Mais plus j’avance dans la vie, plus je traine des boulets, les miens, assez petits, et ceux des autres pas aussi lourds que pour les personnes ‘concernées’ mais cumulés représentent trop de poids.
Ces chaines fictives me freinent et peuvent ne pas être comprises. Presque souvent je ‘voudrais’ être à leur place pour éviter qu’eux ne souffrent, pour que je souffre pour quelquechose et non pour des pensées.
J’aimerai me détacher de ça mais j’ai l’impression que si ça arrive, ça ne serait plus moi.
JV, jeune femme zébrée